from the first seconds (sam)

— teen attitude, teen problems.
Elle regarde autour d’elle, la salle d’attente est terne et glaciale. Cet endroit porte le nom de ‘’planning familiale’’, pourtant Samantha n’avait pas du tout le sentiment d’être dans une famille. Toutes les infirmières passent près d’elles et jettent des regards accusateurs. La blonde de dix-sept ans n’ose pas regarder devant elle, la honte l’accable beaucoup trop et surtout de grosses larmes coulent désormais sur son visage au teint de porcelaine. Une main se pose sur sa main, la demoiselle tourne lentement la tête. Une autre adolescente, comme elle. Elles ne se regardent pas, ni l’une ni l’autre, mais elles traversent la même tempête. Les grands yeux bleus de Samantha se posent sur le ventre de la brune. Elle n’avait pas l’air enceinte, elle non plus d’ailleurs n’avait pas l’air d’une femme enceinte. Tu éclates en sanglot, vous étiez plusieurs à pleurer. Ce n’était pas une décision facile. « Mademoiselle Richard. » La main qui tenait la sienne la lâche et la brune, mademoiselle Richard, se lève et ne se retourne pas. Samantha ne connaîtrait jamais les traits de son visage. L’adolescente la regarde quitter la salle d’attente, la tête haute. Elle sait ce qu’elle doit faire et cela secoue la jeune femme de dix-sept ans. La blonde savait-elle réellement ce qu’elle s’apprêtait à faire ? Sam fixa le vide un bon moment. La vie avait choisi de s’installer en elle. La vie voulait qu’elle devienne sa maman et voulait de Léon comme papa. Au bout d’interminable minute, Samantha choisit de se lever et quitta la pièce. Lorsque la porte se referma sur elle, elle distingua l’appel de son nom. « Mademoiselle Holden. » La blonde s’avança, d’un pas déterminé. Mademoiselle Richard savait ce qu’elle allait faire en se faisant avorter, Samantha quittait l’établissement avec la même force dans les mouvements. Elle porterait à terme ce bébé qui n’avait rien demander.

La blonde et la brune ne se sont jamais recroisés, ni à l’école, ni en ville. Samantha voulait la retrouver pour la remercier de l’avoir poussé à prendre la décision qui la rendrait fière. Elle ne prenait pas la décision la plus facile, ni la plus évidente a annoncé autour d’elle. L’adolescente était chez elle, dans sa chambre. Elle venait d’une famille, mais ils n’étaient pas soudés les uns les autres. Chacun vivait pour soi. Elle ne vivait même pas dans une maison en fait, c’était un appartement où ils partageaient tous une chambre avec quelqu’un d’autre. L’appartement n’avait rien d’accueillant avec beaucoup trop de meubles, des canettes de bières ou de liqueurs qui trainaient un peu partout. La vaisselle s’accumulait en pyramide dans l’évier et sur les comptoirs. La table de cuisine était pleine de divers papiers. Samantha était propre sur elle, mais ce n’était pas le cas de l’endroit familiale. Dans sa famille ils comptaient simplement les nuits avant le 18e anniversaire, la délivrance. Sam le faisait aussi, elle avait hâte de prendre ses jambes à son coup et faire comme son grand frère et ses deux grandes sœurs et ne plus jamais revenir.

Ses mains caressaient doucement son ventre encore tout plat. L’idée la terrifiait au départ. C’est pour ça qu’elle n’en avait pas glissé un mot à son amoureux Léon. Elle avait fait pipi sur un bout de bâtonnet et il était aussitôt ressorti positif. Sam avait alors tout de suite pris la décision d’avorter. Maintenant qu’elle avait emprunter un chemin différent, elle appréciait cette cohabitation. Les nausées matinales faisaient désormais parti de son quotidien, mais elle faisait avec. Ça n’avait rien de comparable à l’énergie qu’elle ressentait à l’idée d’accueillir dans ce monde un petit être qui lui appartenait. Léon et elle seraient pour toujours liés l’un à l’autre et l’idée l’emballait complètement. Son amour pour son petit-ami était aussi puissant qu’un tsunami. Elle l’aimait si fort, depuis si longtemps et il était désormais le sien pour toujours. L’idée qu’il lui glisserait sans l’ombre d’un doute une bague au doigt avant que son ventre ne commence à apparaître l’excitait. Bientôt elle porterait le nom de Samantha Lefebvre. « Toi aussi mon petit Richard. » Le nom lui était venu naturellement. Richard, parce qu’elle était convaincue que cela serait un garçon. Un garçon qui ressemblerait comme deux goûtes d’eaux à son père. Richard parce qu’elle voulait que la femme qui l’avait inspiré fasse partie intégrante de l’existence de son fils. Cette adolescente à la chevelure brune ne la connaîtra jamais, elle ne saura jamais que sans elle, un petit bébé n’aurait jamais vu le jour. Son petit Richard Lefebvre. Maintenant il ne lui restait plus qu’à faire l’annonce à Léon. Il allait sans doute être content, lui aussi rêvait d’une famille avec Sam. En tout cas, c’est ce que Sam croyait. Ils filaient le parfait bonheur et Richard serait simplement la cerise sur le sundea.