//shadow&bone

— don't tell anyone, or you'll be just another regret.

Volume : 14 // Chapter : July

Ses pieds s’écrasent sur la belle herbe, le soleil estival n’avait eu cesse de lui sourire rendant ses courtes tiges émeraude, belle pelouse. Ça aurait pu courir sur les lèvres de Basile mais la contemplation des beautés d’une flore taillée à l’image de l’homme ne faisait pas partie de son programme. Pas aujourd’hui, pas à ce moment précis alors que ses yeux n'étaient pris que par l’imposante bâtisse qui prenait place devant lui. Une maison comme il en poussait beaucoup ici mais dont le spectacle ne cessait pourtant de le surprendre, il ne saurait dire si c’était parce que ces villas étaient trop différentes des simples maisons qu’il avait l’habitude de côtoyer durant son enfance en Virginie ( qu’il continue d’ailleurs à revoir quand il se sentait obligé d’aller visiter sa mère qui ne lui manque pourtant jamais) ou si c’était tout juste son apparence néo-classique qui arrivait à le secouer. Allez Basile, rentre. Le jeune homme s'exécute, franchissant les marches du pérons puis la porte pour obéir parfaitement à la voix mélodieuse et avenante de celle qu’on appelait Mme Corcoran. Une femme toute en jambe et dont la ravissante chevelure blonde, qui ne semblait jamais pouvoir boucler, aurait presque pu le faire passer pour son fils légitime.

Tu sais ou es ton père ? J’aurais aimé qu’il puisse découvrir la maison avec nous dit-elle en se retournant souriante au milieu du couloir qui étincelait pourtant déjà assez. Elle savait sûrement mieux que quiconque où était son homme et ceci à n’importe quel moment de la journée, mais Denise aimait jouer à ce petit jeu où père et fils étaient obligés d’échanger pour, d’après elle, toujours plus se rapprocher. Initiative qui plaisait à son père mais que Basile ne savait juger, de toute façon ça ne semblait pas fonctionner. Je vais lui envoyer un message répondit-il ses doigts s’agitant déjà sur son clavier digital. Elle hocha la tête presque satisfaite, elle aurait préféré qu’il l’appelle mais elle s’en contenterait. Denise était une femme étrange qui jonglait entre l’impulsivité et la retenue, comme un serpent qui se jette vivement sur sa proie puis qui ensuite l’étreignait tout doucement en souriant, sachant que même si elle se débat, tôt ou tard, elle finira par succomber, tôt ou tard elle réussira à la dévorer, pas besoin de se presser.

Basile comprenait sans soucis comment son paternel avait pu tomber amoureux d’une telle dame, elle avait de la prestance, un fort caractère, une grande élégance sans oublier son portefeuille plus que bien garnie, ce que Basile comprenait moins s’était l’attirance que cette femme avait pu ressentir envers un inconnu, qui certes avait quelques qualités physiques et intellectuelle, mais qui pour Basile semblait si fade, sans gluten, ni sucre, qui n’avait en lui aucune épice pour relever le goût et encore moins d’argent pour arranger le tout. Les Corcoran n’avaient jamais été riches, ils n’étaient pas pauvre, mais pas riches, se contentant de vivre dans une bicoque carrée très près des feuillus qui s'élançaient dans les airs pour leur barrer l’horizon. La mère travaillait dans les cuisines d’un restaurant tandis que son père s’occupait de construire et démolir des bâtiments, ils ne s'aimaient pas vraiment, pas du tout, et n’étaient restés ensembles que parce que le sort avait décidé qu’il aurait un enfant pour tenter de les sauver. Le radeau il a tenu huit ans avant de s'effondrer, c’était une surprise pour personne autours de leur taille, ils avaient déjà tous une bouée et se faire emporter chacun de leur côté, Basile avec Papa sûrement parce qu’il tanguait plus par là, mais ce n’est qu’un hasard. Sa nouvelle mère, ils l’ont rencontrée dans un musée, ils ne doivent leur amour qu’au fait que Basile ait eu vent d’une expo intéressante qui se passait par ici durant leur vacance, coup de foudre risible, que par malheur Basile n’a pas pu admirer, car il était coincé au milieu des toiles, mais il peut s’en peine imaginer ce qui s’est passé.

Son père trop droit, une clope à son bec, un coude posé sur la rambarde métallique des escaliers qui mènent à l'entrée, regardant sa montre et son fils qui ne voulait pas se montrer alors qu’ils avaient convenu d’une heure pour se retrouver. De l’autre côté Denise prenant les mêmes marches pour rejoindre sa voiture, sa cigarette désespérément éteinte, et ce bel homme qui s’offre à elle, avec le feu sauveur, sacrée, grâce à laquelle elle a pu cracher sa fumée. Une demie-heure plus tard, quand le gosse daigna enfin sortir, ils étaient encore en train de parler, et Basile pu entendre pour la première fois entendre parler son père d’un art qu’il n’aimait pourtant guère, empruntant les phrases qu’avait pu sortir son fils pour impressionner cette dame qui lui donnait chamade. C’est également la première fois qu’il lui a vraiment souri une fois rentrée, c’est la première fois qu’il y avait une réelle pointe de fierté dans son regard pour sa descendance.

Son téléphone s’allume dévoilant un message qu’il vient de recevoir. Il dit qu’il ne devrait pas tarder, il a quitté le chantier, il y a une demie-heure. Grâce à Denise maintenant papa, il construit des gratte-ciel et des grands-centres commerciaux, le carnet d’adresses de son paternel à bien aidé.Parfait, va voir à l’étage, côté cour, troisième porte, il y a ta future chambre. OK.. Il grimpe assez heureux que Denise soit consciente de son voeux de rejoindre le club de théâtre une fois qu’il aura intégré wave private high school. Il devra sans doute prendre un club de sport à côté, il ne sait pas encore lequel, mais il laissera son père choisir, ça lui fera plaisir. Il grimpe d’un étage, déjà perdu entre les portes qui s’exposent devant lui, ouvre l’avant-dernière pour pénétrer dans sa chambre. Pas mal du tout. Il le souffle entre ses lèvres, alors qu’il découvre l’espace, ou deux éléphants pourraient sans doute tenir, peut-être même une famille complète. Elle te plaît ? Il ne peut que hocher la tête alors qu’elle s’empresse de lui où elle mettrait quoi, une grande bibliothèque sur-mesure pour placer sa collection qui ne fait que s'agrandir. Il faut dire que Basile est un amateur des langues, de tous les mondes, un amateur de lettres, qu’elles soient classiques ou modernes, ses moments libres sont souvent consacrés à la littérature et au sport aussi, car il avait consenti à posséder une certaine forme de beauté physique et intellectuelle. ...Et ici ta nouvelle télé et ta console ? Ma nouvelle télé et ma console ? Oui, oui, on t’en achètera une demain dit-elle en balançant sa main en l’air comme si c’était une broutille. Denise ne faisait jamais attention à ses dépenses et Basile ne savait  égalament jamais comment réagir car elle en faisait toujours trop, il devait déjà la remercier pour tant de choses. Il n'avait même pas l’impression d’avoir sa place dans ce décor, il n’était pas comme ses gosses nés dans l’or qu’il retrouverait dans son lycée. Mais il s’y ferait sa situation est loin d’être à plaindre, personne ne l’entendra geindre.