how to save a life (sasha)

un énième rendez vous médical. un de plus à ajouter à la longue liste. des analyses de sang qui ne sont pas très bonnes, sans doute des traitements à ajuster. rien de bien joyeux, mais c’est presque devenu une habitude. les rendez vous, les prises de sangs, les attentes interminables dans la salle d’attente. mais aujourd’hui c’est un peu different. un peu plus stressant, limite angoissant. parce que lip n’est pas là pour t’accompagner, ni te rassurer. c’est l’une des premières fois où tu te rends à l’hôpital sans lui. le prix d’une confiance trahie. c’est pas évident à gérer. lui dire que tu n’as pas besoin de lui, que tu iras seule à ces rendez vous. voir la déception dans ses yeux. mais à tes yeux, lui montrer que tu n’as pas besoin de lui et l’ignorer, c’est la seule façon de lui faire comprendre que son comportement t’as fait mal. et tu es bien décidée à continuer à agir comme ça. même si ça doit durer. alors aujourd’hui, c’est un peu l’hésitation. repousser le rendez vous parce que tu stresses d’y aller seule ou prendre ton courage à deux mains et y aller. tu repasses en boucle les derniers rendez vous que tu as eu. et puis tu repenses à sasha. sasha, cette fille avec qui tu t’es liée d’amitié il y a quelques mois, rencontrée à l’hopital. tu n’y aurais jamais vraiment cru si on t’avait dit que tu te ferais des amies à l’hopital. et pourtant. pourtant avec sasha, c’était différent. une vraie amitié. quelqu’un qui sait ce que tu ressens avec ces allers retours à l’hopital. quelqu’un qui te comprends. alors tu te décides finalement a lui envoyer un sms. sait-on jamais, si elle est disponible aujourd’hui pour t’accompagner. avec un peu de chance, ça aidera à calmer tes angoisses. sasha te réponds très vite et positivement. en voilà une bonne nouvelle. tu te sens un peu plus rassurée. angoissée certes mais un peu plus sereine. tu prends le temps de te préparer et surtout de ne rien oublier, tes anciennes analyses notamment. et direction le point de rendez vous avec sasha. pas question de la faire venir à la maison. lip est là, et tu n’as pas forcément envie qu’il voit que tu as préféré la présence de sasha au lieu de la sienne à ce rendez vous médical. même si ce n’est pas pour la plus joyeuse des raisons, tu es contente de retrouver sasha. c’est toujours un plaisir de la retrouver et puis tu te dis que un tel service vaudra sans doute bien un café dans un petit salon de thé entre copines. tu n’es pas très bavarde sur le chemin. faut dire qu’entre la situation avec ton frère, la situation avec ta meilleure pote et ce rendez vous, ton moral n’est pas au plus haut. le chemin de l’hopital vous le connaissez toutes les deux. par coeur. le système aussi. aller à l’accueil signaler sa présence, donner un tas de papier et finalement aller s’installer dans la salle d’attende blindée. « je suis désolée de te bouffer ton après midi, avec le monde qu’il y a là, on est pas sortis avant deux ou trois heures » tu soupires un peu dépitée de devoir attendre aussi longtemps. c’est souvent comme ça par ici. c’est presque à ce demander à quoi sert la prise de rendez vous. « mais c’est vraiment hyper gentil de m’avoir accompagnée, merci encore » un mince sourire sur le visage. tu détestes attendre chez le medecin, ça te stresse encore plus. mais une fois de plus, la présence de sasha t’apaises un peu.

Morne quotidien qui défile sous ses yeux alors qu’elle contemple sans les voir ses cours qui s’étalent sur son bureau. Elle devrait étudier, un minimum, elle le sait, mais la motivation est loin d’être là. Sasha et ses phases d’alanguissement beaucoup plus fréquentes que ses sursauts de motivation. Elle lit et relit la même phrase éternellement, sans vraiment s’en rendre compte, alors que son esprit divague, que les mots se forment et se déforment, prennent l’apparence de vers qu’elle finit par coucher sur le papier, bien plus inspirée par ce poème qui lui vient que par l’histoire d’un énième massacre d’indiens par les colons. Et tant pis si la note ne sera pas à la hauteur des espérances du paternel, le poème lui se dessine délicatement à l’encre sur le papier, rend justice à la muse qui se dévoile sous les rayons de lune, ambiance mystique au cœur d’une certaine clairière aux propriétés soi-disant magique, la foudre qui s’abat de nouveau contre toute croyance populaire sur cette souche, au milieu de l’orangeraie. C’est lyrique, c’est onirique, c’est sombre, avec cette petite pointe de violence qui fait sa plume. Elle finalise, ajoute les derniers détails en se disant que c’est probablement l’un de ses chefs d’œuvres, les cherokees depuis longtemps oubliés, quand elle est tirée de son élan par le portable qui vibre sur le bureau. Elle jette un œil, surprise de voir le nom d’Olivia s’afficher sur l’écran. Elle pourrait laisser le message en attente, rester concentrer sur le fil d’inspiration qui s’est emparée d’elle, mais la curiosité prend le dessus, peu habituée à recevoir des messages de la fille Castel. Amie d’hôpital, elle détonnait de par son optimisme dans le monde tout en noirceur de Love, le genre de fille qui lui faisait d’habitude rouler les yeux au ciel, celles qu’elle fuyait comme la peste. Et pourtant, celle là avait réussi à se faire accepter par une Sasha d’habitude sauvage. Allez comprendre. Et quand elle lit le message, la demande de l’accompagner à l’hôpital, c’est assez incongru pour éveiller sa curiosité, voir même une pointe d’inquiétude, ça sort trop de l’habitude pour passer inaperçu. Et vu comment ses devoirs avançaient de toute façon, elle se dit qu’elle n’y perd pas grand-chose. Elle accepte la requête, enfile un pull avant de sortir sans prévenir personne – de toute façon, peu de chance qu’on remarque la différence – direction le point de rendez-vous. Et dès qu’elle arrive, Sasha sent qu’il y a anguille sous roche. Quelque chose de différent dans le sourire, dans les yeux qui pétillent moins qu’à son habitude. Elle balaie l’idée qui se forme dans son cerveau, préfère laisser l’autre mener la danse alors qu’elles se mettent en route vers l’hôpital, mais Olivia garde ce mutisme qui ne lui ressemble pas, et ça fait son chemin dans le cerveau de la Love. Elles s’installent dans la salle d’attente, un sourire vient étirer ses lèvres alors que l’autre semble dépitée. Décidément, c’est le monde à l’envers aujourd’hui. « Oh t’en fais pas pour ça, tu m’as tirée d’une séance de révision d’histoire qui me donnait des envies de me flinguer, alors… » Elle se tourne vers l’autre, étudie le visage qui la remercie, le fin sourire qui se dessine, trop faible. Il y a un truc qui cloche, elle le sent. « Pas de souci. Mais dis-moi, pourquoi tu m’as appelée ? Ca me dérange pas hein, mais je veux dire, c’est pas ton frère qui s’occupe de ça d’habitude ? » Elle ne sait pas qu’elle saute à pieds joints dans le plat, et même si elle le savait, la délicatesse n’a jamais été sa qualité principale.

l’hopital, ce lieu d’une tristesse infinie pour des adolescentes. la présence de sasha a quelque chose d’agréable, d’apaisant. tu n’es pas la plus loquace des deux aujourd’hui et c’est presque bizarre. mais la compagnie est agréable, l’appréhension du rendez vous un peu moindre. sasha arrive a te faire sourire avec ses révisions d’histoire. tu la vois mal passer des heures à réviser quelque chose d’aussi passionnant que l’histoire, mais pourquoi pas. tu te permets de finir sa phrase. « alors tu as gentiment accepté de m’accompagner ici, je me répète, mais merci » entre des révisions d’histoire et le rendez vous à l’hôpital, tu n’aurais clairement pas fait le même choix que sasha. enfin si, pour une amie tu l’aurais fait sans hésiter. mais entre l’hôpital et l’histoire, ta préférence va clairement à l’histoire. puis sasha mets directement les pieds dans le plat. pourquoi tu l’as appelée. tu hoches la tête. elle a parfaitement raison. c’est lip qui t’accompagne toujours ici. elle l’a sans doute déjà croisé plusieurs fois. « si, en principe, c’est toujours avec lui que je viens ici » tu ressens un petit pincement au coeur en avouant cela. la présence apaisante de lip ici te manque vraiment. mais tu fais abstraction, la rancoeur est encore bien trop présence. tu hésites ensuite sur la version à donner. il n’a pas eu le temps de venir aujourd’hui ? il s’est engagé ailleurs ? il se tape peut être une autre de tes potes qui sait. pas crédible pour un sou ces excuses. sasha a déjà du se rendre compte de votre forte complicité, alors lui sortir ce genre de mensonge ne servirait sans doute à rien. alors tu te décides à lui dire la vérité. cette vérité qui bouffe ta bonne humeur habituelle. « on est en froid »  que tu finis par souffler. troisième guerre mondiale même. le silence. l’ignorance la plus totale après ce que tu considères comme une trahison. « et je savais pas qui d’autre appeler » forcément. en ce moment, tes relations étaient un peu compliquées. tu aurais pu appeler artemis ou rusty, mais aucun des deux n’a grâce à tes yeux en ce moment. et eux aussi, tu préfères les ignorer ou au moins limiter les contacts. tu aurais pu appeler adriel. c’est vrai. sa douceur aurait sans doute apaiser tes angoisses. mais le choix le plus simple c’était sasha. parce que sasha même si c’est pas ta meilleure pote, même si des fois tu te demandes comment vous arrivez à vous entendre avec des caractères si différents, elle sait ce que tu ressens à cet instant précis. elle sait ce que c’est les allers et venues à l’hôpital, l’attente dans une salle bondée de malades. elle comprends. mieux que personne. tu n’avais pas hésité très longtemps avant de lui envoyer un message. elle te paraissait vraiment être la mieux placée pour t’accompagner et pour comprendre le langage souvent abstrait des médecins. elle va sans doute mettre les pieds dans le plat sur le pourquoi du comment vous êtes en froid lip et toi. parce qu’elle vous a toujours vu ensemble, soudés. et tu es prête à lui raconter, si elle te le demande, parce que tu sais qu’elle te donnera son avis. avis qui importe à tes yeux parce que c’est certainement pas ce que tu voudras entendre.

« Avec plaisir, ça faisait longtemps que j’étais pas venue en plus, je commence à plus être à jour sur qui se tape qui dans la salle de garde, qui sais, je vais peut-être réussir à rattraper mon retard dans le feuilleton des infirmiers. » Elle lui lance un sourire en coin alors qu’elle se souvient de l’été passé, où elle était restée coincée dans ce trou bien trop longtemps à son goût – merci belle-maman – et où ses connaissances accrues en termes d’interrelationnel dans l’équipe lui avait permis de profiter de certains avantages non négligeables. Comme se faire servir directement dans sa chambre, ou réussir à obtenir des crasses à manger, loin d’être autorisées mais tellement meilleur que ce que l’on pouvait trouver à l’hôpital. Les infirmières l’avaient en horreur, mais elles cédaient à ses demandes, et ça lui suffisait amplement. De toute façon, elle ne comptait pas s’établir dans ce milieu aseptisé de façon durable, donc aucune raison de faire copain-copine avec le personnel. Elle préfère rester de passage, ne pas s’imprimer dans les esprits autrement que comme celle qui tire les ficelles et qui a plus ou moins tous les droits tant qu’elle le décide. Sasha se tourne vers Olivia, qui semble préoccupée. A croire qu’elle a tapé juste en parlant de son frère. Elle attend la suite, réfléchis à une approche un peu plus délicate peut-être, pour satisfaire sa curiosité piquée au vif. « Et… ? Qu’est-ce qu’il avait, un entraînement de dernière minute, un devoir à rendre ? C’est quoi sa grande excuse pour pas être là ? » Elle a du mal à comprendre ce qui pourrait bien expliquer son absence, quand il semble avoir toujours été là pour elle par le passé, en tout cas. Puis la sentence tombe des lèvres de la fille Castel, et Sasha ne peut s’empêcher d’hausser les sourcils, surprise. Elle a du mal à l’imaginer en froid avec qui que ce soit sous ses airs de petit ange, et son cerveau cherche à savoir comment c’est possible. Il a dû merder quelque part, c’est impossible autrement. Elle refuse de croire qu’Olivia ait pu faire quoi que ce soit pour s’attirer les foudres de quelqu’un. Elle semble bien trop douce et trop gentille pour ça. Donc c’est forcément la faute de son frère s’ils sont en froid, elle n’a que très peu de doutes là-dessus. « Pas de souci, je comprends. T’as bien fait, je te dis, tu m’as sauvée la vie je te rappelle. Donc ce serait plutôt à moi de te remercier. » Elle lui offre un clin d’œil avant de s’affaler un peu plus sur sa chaise, le regard qui se perd sur les gens qui attendent, ceux qui le font patiemment, ceux qui râlent parce que vous comprenez, ça fait des heures qu’on est là madame ! Toujours la même rengaine, encore et encore, et clairement, ça ne lui avait pas manqué. « Bon, puisqu’on est là pour un moment encore, tu veux en parler ? Qu’est-ce qu’il a fait pour réussir à s’attirer tes foudres que je pensais inexistante ? No offense, hein, mais je t’imaginais pas vraiment du genre rancunière. » Quitte à devoir faire passer le temps, autant que ça soit intéressant.

la remarque de sasha t’arraches un sourire. elle a pas tort, les histoires entre les infirmiers et médecins ici sont dignes des plus grandes télés novelas. c’est fou le nombre de choses qu’on peut apprendre dans un hôpital sur les relations entre les gens. ça va tellement vite, ça a toujours eu le don de t’impressionner.« tu te souviens de l’infirmière, la blonde que t’aimais pas ? elle se tape le gars là bas depuis quelques semaines » tu désignes un jeune interne. petit nouveau, sans doute de la chair fraiche pour une infirmière. l’avantage a venir ici aussi souvent, c’est que t’es au courant de tout. pas besoin de mots, il suffit de regarder le comportement de chacun ou de quitter l’hopital tard le soir. et faut dire ce qui est, c’est fort distrayant ces petites histoires quand on passe autant de temps que toi à l’hopital. puis la discussion vrille sur ton frère. forcément. il brille aux abonnés absents aujourd’hui. c’est presque si même le personnel médical est surpris de cette absence. « ça serait trop simple si il avait ce genre d’excuse » tu peux pas t’empêcher de pouffer de rire. sasha ne sait pas ce qu’il se passe avec son frère, elle sait juste pour une fois qu’il n’est pas là et visiblement elle en est étonnée. pourtant il n’est effectivement pas là et la seule excuse c’est que tu n’as pas voulu qu’il vienne. sa réaction quand tu lui avais dit préférer venir ici seule t’avais fait drôlement mal. la déception dans ses yeux. la rage de celui qui préfère ne rien dire plutôt que d’envenimer les choses. tu lui as fait mal avec cette décision. tu le sais. et le pire c’est que tu t’en voudrais presque alors que c’est lui qui a merdé. tu souris face à la réponde de sasha, pas sure qu’elle ait réellement besoin de te remercier. l’inverse par contre, ça c’est sur. mais tu l’as déjà remerciée plusieurs fois alors passons. et forcément, comme tu l’imaginais, la question sur le pourquoi du comment tu es en froid avec lip arrive. tu ne peux pas t’empêcher de rire à la remarque de ton amie. elle ne t’imagine pas rancunière. c’est vrai qu’en principe tu ne l’es pas plus que ça. mais avec lip, c’est different. c’est la déception qui parle, le mensonge, le fait qu’il arrive à te regarder droit sans les yeux sans sourciller après avoir couché avec ta meilleure amie. tu réfléchis quelques instants, pas sure de trop vouloir en parler. mais bon, il faut bien passer le temps. « il s’est tapé ma meilleure amie » ton regard se perd dans la salle, il y a quand même plus grave que ça dans la vie. « c’est elle qui me l’a dit. ils ont couché ensemble par ennui et vengeance » ça te dégoute rien que d’en parler à nouveau. « il avait pas l’intention de m’en parler. genre il se tape ma meilleure amie, dans la chambre à coté de la mienne et il fait comme si de rien n’était » ça fait bizarre de se l’entendre dire. la première fois que t’en parles à quelqu’un qui n’est pas directement concerné par l’histoire.

Liv lui rapporte les derniers potins de la vie de l’hôpital, et elle jette un œil sur le petit nouveau, un interne, encore jeune, et loin d’être désagréable à regarder. S’il y avait eu ce genre d’interne l’été passé, elle se serait nettement moins ennuyée. « En même temps, qui ne voudrait pas se le taper avec son petit cul ? » Elle-même ne dirait pas non. Elle lui lance un sourire entendu avant que le sujet ne retourne sur son frère, qui semble avoir une excuse autrement plus complexe que ce que Sasha pouvait s’imaginer, et ça l’intrigue. Elle ne connait pas vraiment Olivia, si ce n’est qu’elle vient régulièrement à l’hôpital pour sa maladie, qu’elle est plutôt du genre douce et gentille, et qu’elle est généralement accompagnée de son grand-frère qui lui suit comme son ombre dans les couloirs – légèrement trop présent pour une Sasha qui trouverait ça particulièrement étouffant. Mais en dehors de ça, elle la croise simplement dans les couloirs de temps, et de ce qu’elle en a vu, elle avait plutôt rangée Olivia dans la catégorie des filles sans histoires, discrètes, celles qu’on ne repère pas plus que ça car se tenant loin de toute sorte de drama typiquement adolescent. « Tu piques ma curiosité là, vas-y, dis m’en plus. Spill the tea. » Et quand le verdict fini par tomber, qu’elle lui balance la faute qui vaut à son frère de ne pas être présent aujourd’hui, Sasha ne peut s’empêcher d’exploser de rire. C’est tellement loin de tout ce qu’elle aurait pu s’imaginer, ça la prend tellement de cours qu’elle trouve ça juste magique qu’on puisse être aussi con. « Putain t’es sérieuse ? Mais, il a un cerveau au moins, rassure-moi ? Ou comme une bonne partie des mecs il pense qu’avec sa bite ? » Apparemment la dernière option, vu les explications de sa meilleure pote. Le revenge sex, rien de pire pour foutre en l’air ses relations, les dommages collatéraux toujours bien plus élevés que le plaisir en lui-même, elle n’a jamais compris ce principe qui clairement, n’en vaut pas la peine. Elle réfléchit, essaie de voir si elle la connait, sa meilleure pote, si elle voit qui c’est, et soudain c’est l’illumination. « Ta meilleure pote, c’est pas la petite blonde qui s’est tapée la moitié du lycée ? » Elle essaie de retrouver son sérieux face à une Olivia qui elle semble vraiment touchée par toutes ces histoires de coucheries. Pas forcément la meilleure des psychologues, mais quitte à être là, autant faire ce qu’elle peut avec le peu de délicatesse qu’elle possède. « Et il pensait sincèrement que ça allait pas sortir un jour ? C’est le genre de connerie qui refait toujours surface, faut vraiment pas être malin pour penser que ça restera enterré à jamais. Mais je suis surprise que ce soit venu d’elle. Pourquoi elle te l’a dit ? » Clairement ce serait le genre d’information qu’elle garderait pour elle le plus longtemps possible, à moins d’avoir une excuse tangible.

ton regard se pose sur le fameux interne. c’est vrai qu’il a l’air plutôt charmant. la remarque de sasha t’amuses. tu admires ce coté cash qu’elle a. jamais tu oserais parler comme ça, surtout pas à l’hopital où les murs ont des oreilles. « euh moi ?! » tu ris, les infirmiers et les internes, tu les vois tellement ici que envisager quoique ce soit te dégouterait presque. et puis avec ton frère qui t’accompagne à chaque visite par ici, autant dire qu’envisager ce genre de choses est impensable. totalement impensable. le sujet lip arrive ensuite sur le tapis. un grand frère à la limite du body guard lors de tes nombreuses visites ici. même sasha a du le remarquer. toute le monde le sait ici de toute façon. olivia sans lip ce n’est jamais arrivé. aujourd’hui n’est rien d’autre que l’exception qui confirme la règle. au fond de toi, tu espères que ce sera la seule fois. mais sans trop d’espoir. sasha semble curieuse de connaitre toute l’histoire. alors tu déballes tout. sans barrière ni rien. et tu te sens presque mieux maintenant d’avoir posé les bons mots. et surtout d’en parler à quelqu’un de neutre. parce que entendre artemis, lip ou sander, les excuses de l’un, les explications des autres, à force ça devient compliqué. tu acquiesces lors qu’elle te demande si tu es sérieuse. tu aimerais ne pas l’être. mais pourtant si. tu l’es. et en la voyant rire comme ça, tu ne sais pas comment réagir. c’est ironique mais son rire te ferait presque rire de la situation, à toi aussi. « avant que je t’aurais dit que oui. maintenant, je pense que ça se discute » tu peux pas imaginer que ton frère ne pense qu’avec ses couilles. même si en soit c’est fort probable. c’est pas imaginable. pas dans la vision que tu as de ton frère, de ce gars que tu aimes plus que tout et qui a toujours était hyper présent pour toi. « elle même » la réputation d’artemis la précède. t’es même pas surprise. tout le monde le sait. et là c’est limite si tu as pas l’impression d’être le dindon de la farce. comme si sasha n’était pas si étonnée que ça qu’artemis se soit tapé ton frère, parce qu’après tout elle s’est tapé la moitié du lycée. « il en était convaincu » tu grimaces. il allait continuer de faire comme si de rien n’était, comme si tout allait bien dans le meilleur des mondes. ni vu ni connu. et comme ça, il pourra continuer à se taper tes potes. tranquillement. « elle se sentait mal de devoir me cacher ça soit disant » tu sais même plus quoi en penser. entendre sasha te dire qu’elle est surprise qu’artemis ait dit la vérité. sous entendre que ton frère est un abruti d’avoir cru que tout ça resterait secret. ça te perds un peu beaucoup.

« T’es bien difficile dis donc. » Elle taquine, pas surprise de la réponse de la Castel concernant le potentiel baisable de l’interne. Pas l’air d’être son genre, les histoires sans lendemain, et elle trouverait presque ça mignon, ce côté jeune fille en fleur. Ou bien c’est le fait d’avoir un grand frère un peu trop présent, ça doit forcément bloquer les choses à certains niveaux, pour peu qu’il se soit donner mission d’empêcher sa petite sœur de finir dans les mauvais draps – ou dans des draps tout court. Frère qui lui ne se gène pas pour aller voir là où il devrait éviter d’aller, apparemment. L’hôpital, la charité, ça reste un concept flou pour certain. Sasha a vu juste en ce qui concerne la meilleure amie, et elle lâche un sifflement presque admiratif devant l’ampleur de la situation. « Eh bah, c’est du beau tout ça. Pardon mais, comment une fille comme elle et une fille comme toi deviennent amies au départ ? Vous avez l’air tellement… différente ? » Entre la douceur et l’impulsivité incarnée, on pourrait croire qu’il y a tout un monde. A croire que les opposés s’attirent réellement ? Olivia grimace en avouant que son frère pensait réellement garder ça pour lui, et Sasha ne retient pas le rictus qui monte dans sa gorge. « Plutôt con que vaincu si tu veux mon avis. » La question dérive sur l’autre coupable dans l’histoire, la fautive, cette qui a fini par cracher le morceau, et ça la rend perplexe, Sasha, qu’elle ait pu passer aux aveux. Elle essaie de se mettre dans la situation, de s’imaginer face à Dulcie si elle avait été faire un tour du côté de chez Sohan, et ça lui pose question. Elle se dit qu’effectivement, elle aurait été incapable de regarder la douce en face, de faire comme si de rien n’était, potentiellement. A condition qu’elle ne soit pas abruti par son traitement, bien sûr. « Ca me parait bizarre… Je veux dire, je la connais pas hein, mais je vois deux choses. Soit elle est vraiment mauvaise, et elle te l’a dit juste pour te faire du mal, et dans ce cas, faudrait peut-être revoir tes choix niveaux meilleure amie. Soit elle s’en voulait vraiment et dans ce cas j’avoue que j’admire. Pas d’avoir couché avec ton frère hein, mais qu’elle te l’ai dit. Perso dans la même situation, je crois que j’aurais jamais eu les ovaires de l’ouvrir, que j’aurais gentiment fermé ma gueule en espérant que ça refasse jamais surface. Je dis pas qu’elle a eu raison de le faire, mais elle a des cojones, la petite. »

la légèreté de sasha étire un sourire sur ton visage. c’est presque à croire qu’elle te connaît trop bien. « t’imagine même pas à quel point » tu peux pas t’empêcher de rire. t’es le genre de nana qui n’aime pas les coups d’un soir, qui préfère croire que le grand amour existe, le prince charmant, ce genre de chose. le fait que lip garde un oeil sur tes fréquentations a sans doute joué, qu’il n’aime pas quand un mec s’approche un peu trop près de toi. mais au fond, tu as toujours été comme ça, un peu fleur bleue, l’optimiste qui croit encore à l’existence des contes de fées. « on est totalement différentes oui » et quand tu y penses, tu te demandes encore comment votre amitié a pu tenir aussi longtemps. on ne peut pas dire que vous ayez beaucoup en commun niveau caractère. le feu et la glace, le calme et l’explosif. « on se connait depuis tellement longtemps, on est amies depuis qu’on est gamines » et le temps a fait son travail comme il faut. une amitié fidèle. loyale jusqu’à présent. jusqu’à qu’elle se tape ton frère. sasha donne son avis, ton frère est con et ça te fait limite plaisir à entendre. pour une fois que quelqu’un le dit haut et fort. pour une fois que personne n’essaie d’enterrer le truc, comme si il ne s’était rien passé. pour une fois que lip n’est pas une victime dans l’histoire. c’est agréable. enfin quelqu’un qui comprend ta colère et ta position. la discussion vrille ensuite sur artemis. même si tu lui en veux toujours, tu peux pas croire qu’elle soit mauvaise. tu peux pas accepter l’idée qu’elle aies avoué la vérité juste pour te faire du mal. impossible. la deuxième option te parait plus plausible, plus logique. « je crois qu’elle s’en voulait vraiment. elle arrivait pas à me regarder dans les yeux quand elle me l’a dit, elle avait l’air vraiment mal » enfin mal, tout est relatif. elle a juste explosé. du grand art version artemis swanson. mais tu sais bien que pour exploser comme elle l’a fait ce jour là, c’est qu’elle n’allait pas bien. « de toute façon, comme tu l’as dis, ça serait forcément ressorti à un moment où à un autre. » et clairement, tu préfères l’avoir appris par l’un des deux principaux intéressés qu’au détour d’une soirée.

Les amitiés d’enfances, elle connait pas Sasha. Elle en a eu, mais après son départ de l’Alaska pour venir s’installer à Nevada City quelques années plus tôt, on ne peut pas dire qu’il en reste grand-chose. Et puis, avant son diagnostic, les autres enfants avaient déjà tendance à la fuir. Trop sombre, trop souvent triste, ou sans émotions, vide, pas très souriante la gamine, et plutôt du genre à fuit les groupes et les jeux qui la fatiguait plus qu’autre chose pour se poser avec un bouquin dans un coin, ou faire la sieste. « J’admire. C’est rare les amitiés qui durent si longtemps. Enfin, à voir ce que ça durera encore, vu comment ça m’a l’air parti ton histoire. » Pas vraiment du genre optimiste, la Love, elle n’a jamais été de celles qui offrent des discours rassurant aux autres, ceux qui enrobent la réalité dans un cocon digne du monde des bisounours, tout ça pour bercer l’autre d’illusions. Non, elle a toujours préféré être franche sur ce qu’elle pense, quitte à parfois paraître un peu brutale, mais on ne peut pas dire que les émotions des autres soit au sommet de ses préoccupations. Elle fait un effort, de temps en temps, lorsque la personne en face a réussi à gagner un peu de son affection, mais c’est tout. Elle écoute Olivia qui fait le tri dans les hypothèses proposées en haussant les épaules. Heureusement qu’elle s’est sentie mal, qu’elle a envie de dire, mais elle se retient de justesse, parce que ça sortirait accompagné d’un rire sarcastique qui n’est peut-être pas des plus appropriés alors que l’autre semble sincèrement perdue et blessée par toute cette histoire. Non pas que Sasha ne comprend pas à quel point ça peut l’atteindre, elle peut l’envisager, essayer de s’imaginer sa douleur. Mais elle n’est pas certaine de ressentir elle-même autant de chaos à situation égale, bien trop au-dessus de ce genre d’enjeu émotionnel. Elle se tourne vers la blonde, cale son bras sur l’accoudoir pour venir poser sa tête sur son poing fermé. « Et du coup, tu comptes faire quoi avec tout ça ? La gueule à tout le monde à durée indéterminée ? Ou tu vas essayer d’arranger les choses avec l’un et l’autre ? » Après tout, il leur reste encore quelques heures à attendre.

artemis et toi, c’est vrai que c’est une belle histoire d’amitié. la plupart des gens ont des amis à l’école primaire, puis de nouveaux amis au collège et ça change encore au lycée. mais vous deux non. toujours là. toujours amies. depuis quoi, dix ans ? peut être douze ? c’est beau. cette fidélité. tu n’y aurais jamais cru si on te l’avait dit. « on verra bien ! » tu sais pas trop en fait. l’optimisme est une seconde nature chez toi, mais tu doutes un peu quand même. parce qu’elle t’as fait mal artemis. deux fois. en quelques semaines. alors si votre amitié survit à cela, tu sais qu’il va te falloir du temps. pour accepter, pour pardonner. oublier, tu sais que ça sera impossible. parce que tu vois lip tous les jours et arty régulièrement. tu espères juste que l’idée même qu’ils aient couché ensemble finisse par disparaitre de ton cerveau. qu’elle se range au fin fond d’un tiroir et qu’elle ne ressorte plus. jamais. mais ça serait être trop optimiste. parce que tu connais ton frère par coeur. tu sais que le jour où il te croisera avec arty, cette histoire reviendra sur le tapis en un clin d’oeil. la question de la suite forcément pointe le bout de son nez. comment gérer. c’est une question que tu te poses encore. tu sais pas trop. pour l’instant c’est encore silence radio avec lip et quelques réponses à artemis parce qu’elle cherche à communiquer. c’est pas trop ton délire de faire la gueule comme ça. mais c’est le seul moyen que t’as trouvé pour faire comprendre à lip qu’il a merdé et pour qu’il finisse par s’excuser, mais on en est pas encore là « pour l’instant, faire la gueule aux deux me semble une bonne option. » tu souris légèrement. « d’où l’absence de lip aujourd’hui » ceci explique cela. « je verrais ensuite, mais tu vois, arty, j’le vois qu’elle s’en veut. alors que mon frère, c’est à peine si il admet avoir fait une connerie. on a jamais eu de secrets lui et moi, et là, il me cache ça…» et ça te fait douter de tout. parce que si il cache ça, même si c’est pour te protéger, tu te dis qu’il peut te cacher mille et une autres choses. ça va vite dans ton cerveau. très vite, peut être un peu trop vite. mais tu n’admets pas qu’il ait pu te cacher un truc comme ça alors que tu as une confiance aveugle en lui et que toi, tu lui racontes tout.